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Alexandre Grothendieck, Récoltes et semailles

Le 4  juillet 2008 par Jean Zin

Alexandre Grothendieck enfin publié !

Alexandre Grothendieck est l’un des plus grands mathématiciens vivants (fondateur, avec Serre et Dieudonné, de la géométrie analytique, grand producteur de nouveaux concepts) mais c’est aussi un écologiste convaincu dénonçant les dérives de la science et les dangers de la technologie. Son livre testament, Récoltes et semailles, appelé "le mille pages" et disponible depuis longtemps sur internet, va finalement être édité !

En éditant son oeuvre monumentale, l’IHES rend hommage à un mathématicien génial qui mena une réflexion lucide sur la recherche. Jusqu’à s’en retirer il y a trente ans.

On peut toujours télécharger le livre en pdf -> Récoltes et semailles

C’est tout-à-fait lisible, arrivant à nous faire partager les problèmes que se pose le mathématicien et qu’il s’agit avant tout de nomination des formes, de leur définition, le seul problème c’est que ça fait 1000 pages, mais on n’est pas obligé de tout lire...

Sciences et Avenir consacre un article à cette publication en hommage à Grothendieck :

Ce livre curieux qui mêle biographie et mathématique me semble illustrer ce qui se passe quand le scientifique doit s’inclure dans son discours, quand il doit dire la vérité sur le scientifique lui-même, pas seulement sur son objet, rendre compte dans l’énoncé de son énonciation, rendre compte non seulement du créé mais de la création. Ce qui relativise le savoir du scientifique mais renforce d’autant la vérité scientifique même si elle en change la perspective à devoir en assumer l’énonciation, l’intentionalité.

Il y avait avec Laborit aussi une façon de parler de ce que nous sommes, de notre biologie comme de nos grilles de lecture, ce qui incluait le sujet dans son objet, sans remettre en cause la vérité des faits mais seulement leur interprétation. Cela me semble de l’ordre de la réflexion (objective) plutôt que de l’introspection (subjective).

Je vous livre le début de l’avant-propos qui est intéressant à plus d’un titre. Ainsi, on pourrait croire qu’il s’agit de dénégation, d’inhibition, voire d’une coquetterie d’écrivain : dire qu’on ne peut écrire l’avant-propos en l’écrivant ! En fait, comme souvent en mathématique, l’énoncé d’une impossibilité est ce qui permet de la dépasser en dévoilant l’intentionnalité sous-jacente. L’aveu de l’échec le transforme en victoire. La vérité c’est d’abandonner ses illusions, sa vanité, le contraire du vendeur et de la séduction.

Au début de son parcours, en rendant hommage à son instituteur, il suggère que c’est l’homme universel, l’honnête homme de notre temps, capable d’enseigner toutes les matières, exemple même de transversalité alors que les professeurs d’université ne font que lire toujours le même livre...